Janus sur le seuil

Janus on the Threshold

Cela a commencé par des échanges que nous avions hebdomadairement avec Dork, médusés par les videos postées sur YouTube par les actrices et acteurs des révoltes arabes à partir de 2011. Du matériau filmique s’accumulait chaque jour et les différentes parties en conflit dans le monde arabe menaient également une guerre des images que nous observions en croisant les sources - des films amateurs aux films d’auteur en passant par les films d’artistes et ceux de différents collectifs. Nous avons organisé plusieurs projections-débats autour de ces enjeux et Dork y consacra au fil des années une série d’essais recueillis dans cet ouvrage dont il me fit l’honneur de me demander la postface. L’ouvrage a été traduit en anglais et a connu récemment une nouvelle édition augmentée en version poche. Cet essai fut l’occasion pour moi de reprendre les questions des liens entre l’esthétique du politique et la politique de l’esthétique. L’occasion aussi de reformuler - à travers les textes de Dork et de Serge Daney - les problèmes que posent le représentation de l’horreur à une époque où les normes visuelles de l’Occident nous revenaient, comme par un effet boomerang, sous les traits insoutenables de la propagande de Daesh. L’occasion enfin de témoigner de mon enthousiasme pour le travail de Dork, pour sa vigilance politique comme esthétique et pour sa manière de questionner la manière dont le cinéma doit accueillir, dans sa propre poétique, les causes et les effets d’images filmiques venues d’ailleurs.